Les soirées électorales ne sont pas toujours joyeuses.

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Après quelques minutes d'évanouissement, celui qui se faisait appeler Tinal d'Abrens reprit connaissance. Il se tourna sur le dos et soupira lourdement.
Que faisait-il là ? Que cherchait-il à prouver ? Et à qui ?
Personne ne le connaissait ici et on aurait tôt fait de l'oublier.
Pourquoi ferait-on confiance plus à lui qu'à ce barbare de l'université pour diriger la ville ?
Il soupira encore.
Une grande fatigue et une lassitude morale accablante s'abattirent sur lui aussi sûrement qu'une bande de crève-la-faim sur un quignon de pain. Lentement, il se releva et traîna ses bottes jusqu'à la taverne des Saltimbanques où il espérait trouver un peu de réconfort et de chaleur, de l'humanité et de la musique, de la tranquillité et un bon repas...

Sans autre forme de cérémonie, il entra, tête basse et les épaules tombantes dans la taverne alors que le soleil déclinait déjà. Il ne chercha pas à savoir si on l'avait, ou pas, remarqué, chose qui, en temps normal, lui importait pourtant beaucoup, et s'assit dans un coin à l'écart. Il leva le bras distraitement pour réclamer qu'une serveuse approche et passa commande d'une voix monocorde et fatiguée :

- Une écuelle de potage aux légumes et aux herbes, une miche de pain noir aux amandes, un saucisson d'âne aux cacahuètes, trois cailles rôties et confites dans de la sauce aux pelures d'oignons sauvages, une demi-douzaine de brioches au sucre et deux bouteilles d'hydromel, s'il vous plait. Je n'ai pas très faim, ce soir...

La serveuse le regarda, interloquée, mais n'eut pas le loisir de répondre à ce client si étrange car il s'écroula sur la table avec un bruit sourd, immédiatement suivi d'un ronflement rauque. Son esprit divagua un instant dans les limbes de ses pensées troublées puis s'en fut avec célérité fouiller dans des souvenirs remontant plus d'une année en arrière...

Pour la suite...

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*Même pas maire à part entière ! Je suis juste un DEMI-maire. Quelle chierie !*

Ah, la vie est parfois difficile et à Chnafon plus encore qu'ailleurs semblait-il.
La déception était très grande et la morosité au rendez-vous pour le nouveau (demi) maire de Chnafon, attablé dans un coin de la taverne faiblement éclairé par une paire de bougie posées dans un lampion au milieu de la table.

*Putain de putain ! C'est pas possible ce genre de truc. Y a qu'à moi que ça arrive ou quoi ?*

Il laissa tomber sa tête sur le bois de la table dans un bruit sourd.

*Je suis maudit* pensa-t-il à part lui. Puis, il saisit la bouteille d'hydromel, se redressa et, portant le goulot à sa bouche, la vida à grandes gorgées débordantes. Il poussa un gros soupir et se laissa retomber sur sa table. Il demeura ainsi, avachi comme un poivrot, un long moment.

Pleurait-il comme une lavette ? C'était-il endormi comme un con ? Ou réfléchissait-il avec intensité ?
Lui seul le sait. Le tout est que, tard dans la nuit, le tenancier le ficha dehors à coups de pieds au derche pour pouvoir fermer et rentrer se coucher comme tout le monde et qu'il ferait bien d'en faire autant au lieu de faire chier les honnêtes gens ! Non mais !

Démonstration était faite que personne ne savait, davantage maintenant qu'auparavant, qui il était. Et ça, c'était insupportable ! Il fallait que ça change et que dès le lendemain tous, jusqu'au dernier, soient capables de le reconnaître à cent pas, de dos et de nuit avec le soleil dans les yeux ! Il allait devenir le personnage le plus connu de Chnafon car il en était le personnage le plus important, bordel ! Il était maire (enfin demi-maire) et nul de devait plus l'ignorer ! Sa décision était prise.

D'un pas assuré et remonté comme un coucou, il fila jusque chez le tisserand pour se faire confectionner son nouvel habit.

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